Du gré à gré pour faire progresser le train PNDES

Critiqué pour son indolence dans la mise en œuvre de son programme de développement socio-économique, le pouvoir burkinabè a choisi, pour faciliter les investissements publics-privés, d’assouplir les procédures de passation des marchés publics.  Malgré les réserves  de l’opposition et d’une partie de l’opinion, le gré à gré sera le carburant qui fera peut-être enfin sortir le train PNDES de gare. 

 
Il avait tancé le gouvernement de Paul Kaba Thiéba pour sa nonchalence, Salifou Diallo, le Président du parlement burkinabè, est décidé à le faire se bouger. Coûte que coûte. Quitte à enfiler sa tenue de chef de parti au point d’oublier le devoir de réserve que lui exige sa fonction. Quitte aussi et surtout à frustrer l’opposition parlementaire dont l’écrasante majorité, en guise de protestation, a quitté l’hémicycle le jour du vote.
 
Aux forceps donc, l’Assemblée nationale burkinabè a, début juillet, voté le controversé projet de loi sur l'allègement des procédures de contractualisation du programme Partenariat public-privé (PPP). Une mesure transitoire qui sur six mois autorise le gouvernement à contracter par gré à gré des accords de partenariats avec des entreprises privées.
 
La majorité n’a eu cure des cris d’orfraie poussés par l’opposition parlementaire. Pas plus que pour ses mises en garde quant aux dérives corruptrices que pourrait occasioner cette loi. L’enjeu manifeste pour le pouvoir est  ailleurs et est énorme. En 18 mois de gestion, on peine à cerner clairement les contours d’un Burkina en progrès, pourtant promis par  le candidat Kaboré. Routes, santé, eau, éducation, emplois, les Burkinabè s’impatientent et veulent des résultats.  Pour y répondre et vite, il faut se délester de la lourdeur des procédures inhérentes la commande publique.
 
Vision ?
 
Entre la recherche de solutions aux problèmes conjoncturels et les nécessités de réformes structurelles de l’économie burkinabè, le pouvoir semble tiraillé dans une sorte  chassé-croisé au point de n’avoir pour l’instant pas défini clairement ce qu’il entend faire exactement dans les PPP.
 
Quels modèles de PPP adopter ? Quels types investissements privilégiés? Comment concilier besoins impérieux d’investissements socio-économiques et transparence dans la gestion ? Les questions sont nombreuses. Ce flou dans la vision stratégique et dans la communication gouvernementale crédite les thèses des plus sceptiques qui n’entrevoient dans les PPP qu’un cheval de Troie pour mieux piller les ressources publiques par favoritisme.
 
Certes Compaoré n’a pas laissé le Burkina dans un état totalement exsangue. Mais les besoins en infrastructures restent énormes. La hardiesse du pouvoir Kaboré à les réaliser est alors compréhensible. Car, plus que la focalisation sur une non réélection en 2020, c’est la hantise de n’avoir pas pu mieux faire que son ancien mentor Blaise Compaoré, qui habite le Président Kaboré et son camp. Sur les PPP, le pouvoir joue gros. Dans six mois, il devra tendre au peuple, les premiers fruits de ces partenariats.
 
Et pour avoir cadré le débat de l’opportunité d’allègement des procédures de passations des marchés publiques sous le prisme d’un « patriotisme développementiste » de bon aloi, le pouvoir a pris un risque : celui de n’avoir pas le droit d’échouer. Sans quoi, le retour du bâton risque d’être très amer.

Boureima Salouka

Mai 2017